samedi 4 mai 2019

Le pire des cadeaux à offrir (pour la fête des mères comme pour n'importe quelle autre occassion)

Depuis avant que j'aie une opinion sur le végétarisme, depuis avant que j'aie une opinion sur les méthodes d'exploitation agricole, depuis que je suis adolescent, j'ai une drôle de relation avec les bouquets de fleurs coupées.

Je suis assez révulsé par l'idée de couper des organes sexuels de fleurs et les conserver dans un récipient d'eau avec des vitamines pour les faire flétrir le plus lentement possible. Je n'ai pas ce même sentiment envers des poils ou des plumes, seulement le fait que ça continue à vivoter comme ça, flottant dans un vase en attendant la mort inévitable me met mal à l'aise.

Adolescent, j'avais l'impression que les couronnes mortuaires étaient inconsciemment un dernier fuck you à la nature. «J'ai perdu un être cher, dame Nature? Regarde ce que je suis capable de te faire subir.» Aujourd'hui, je suis plus apte à accepter que ça fasse plaisir à du monde, et je dois admettre que j'ai donné quelques fleurs artificielles au cours de ma vie pour me conformer.

Mais sérieusement, il n'y a pas un meilleur cadeau à donner à des gens qu'on aime? Ça leur fait si plaisir que ça? N'importe quoi d'autre ne serait pas aussi efficace?

Je pourrais vous parler de toute la question de la culture des fleurs et essayer de vous faire sentir cheap ou coupables de cette industrie horrible. Mais c'est même pas mon point. Quand je passe devant un fleuriste, je me demande pourquoi ils existent encore (un sentiment que j'ai aussi lorsqu'on m'appelle pour de la sollicitation téléphonique), ou pourquoi on ne peut pas juste avoir des plantes complètes à la place.

Je comprends que c'est une tradition pour bien des occasions, mais une tradition n'a jamais été une excuse pour faire n'importe quoi. En quelque part, je vous souhaite bien du plaisir si ça vous plaît et que c'est nécessaire à votre vie, je crois à votre liberté de le faire, mais je voulais prendre 2 secondes pour vous dire que je ne jouerai plus jamais à ce jeu-là.

lundi 4 juin 2018

Trump vs Père Noël vs Elsa

Notre relation avec la vérité, comme société, est une affaire complexe. On fait juste pointer en direction de Trump et notre doigt risque de se faire arracher par le vortex de «Fake News». Des soirs, comme parent, je bénis le fait que ma fille ne comprend pas encore tout ça, parce que je me sentirais un peu impuissant à lui expliquer. Sérieusement, je comprends comment on peut prendre pour acquis sans réfléchir des choses de gens en qui on a confiance, mais à une échelle comme celle-là, je dois admettre qu'il y a une part de ça qui me dépasse totalement. La seule chose que je peux faire, c'est d'affiner le plus possible son sens du réel, pour qu'elle soit capable de nager dans la mer d'information numérique sans s'y noyer.

On va se le dire, j'ai jamais voulu faire croire à quiconque que le père Noël existe, mais maintenant, je pense que c'est un véritable handicap à donner à un enfant. Si c'est correct de mentir à un enfant pour le père Noël, pourquoi c'est pas correct que Trump mente? Je comprends que les mensonges n'ont pas nécessairement la même proportion ou le même but, mais ça sert à quoi pour vrai? Elle est où, la nécessité ou de valeur pédagogique à faire ça? Si c'est juste pour le plaisir, on peut-tu faire quelque chose d'autre à la place, qui ne compromet pas la limite entre la réalité et la fiction?

Pire encore, si on parle de «préserver la magie», j'aimerais vous rappeler que des millions d'enfants sont capables de profiter d'Elsa et de faire acheter à leurs parents des millions de dollars de produits dérivés tout en sachant bien que ce n'est qu'une histoire. Les histoires sont des choses magnifiques qui expriment tant de belle chose, mais la réalité aussi a une magie considérable.

Si vous avez besoin de vous en convaincre, prenez 2 secondes pour regarder le ciel au-dessus de vos têtes, le monde qui nous entoure. Il regorge de mystère, d'inconnu, de magnifique et de terrible, autant de matière première pour des histoires toutes aussi remarquables que lui, sinon plus remarquables encore.

Mais on doit aussi composer avec un internet qui, parce qu'il désire nous vendre de la pub, cherche plus à nous conforter dans nos opinions que de nous aider à voir clair et faire la part des choses. Je ne pourrai jamais vraiment savoir ce que c'est, grandir au milieu de tout ça. La seule chose que je peux faire, c'est d'être un guide, les flotteurs de mon enfant jusqu'à ce qu'elle apprenne à nager seule.

samedi 3 juin 2017

Un nationalisme à l'ancienne

Un de mes mantras est de rencontrer les gens là où ils sont, c'est-à-dire d'aller vers l'autre et de trouver ce qui est commun. Ce n'est pas à dire de simplement trouver une opinion consensuelle, mais simplement de présenter un sujet selon les inclinations de l'auditoire autant que les siennes. Quand j'ai lu cet article la semaine qui suggère de résister à l'idéologie de dissolution nationale, j'ai éprouvé un inconfort tenace. Je croyais entendre un homme qui se désolait que son opinion ne plaise pas à la population plutôt que de quelqu'un qui souhaitait convaincre.

Je pense qu'il faut réfléchir longuement et sérieusement à la manière dont on passe le message de l'intérêt de la culture francophone du Québec. La manière de couvrir l'actualité a énormément changé au cours des dernières années, et j'ai l'impression que des articles comme celui-là sont des calories vides qui n'amènent au débat qu'un sentiment d'outrage à une clique d'initiés.

Encore cette semaine, on présente la poutine comme un symbole de l'appropriation culturelle canadienne. Le simple fait que cet article ait fait des vagues signifie que la question de l'identité est encore dans l'air du temps. Mais force est de constater, il est traité différemment, comme une sorte de fait divers. Si tout le monde est trop occupé à s'offusquer, personne ne pose les questions qui découlent de cette histoire.

Je serais curieux de savoir si ces jeunes si pleins de « liberté d’être » seraient à l'aise de faire partie des dernières générations de francophones au Québec. Et je ne parle pas des ailes jeunesses des partis politiques, je parle des autres citoyens qui sont tout aussi légitimes. Si ce n'est pas grave pour eux, alors il faudrait les questionner sur le pourquoi. S'ils sont mal à l'aise d'être les derniers, que voient-ils comme solutions?

Pour moi, contrer la dissolution nationale, c'est d'arrêter de parler de notre culture comme si c'était un buste sur un piédestal, mais de l'exprimer comme un phénomène actuel. L'aspect historique et politique ne sont pas dénués d'intérêt pour autant, mais il faut leur donner une part du gâteau qui soit conséquence aux réalités d'aujourd'hui.

lundi 22 mai 2017

Une fraude identitaire

Il y a des articles comme celui-ci que je ne peux pas ignorer et qui demandent une réponse musclée. Tout m'y chiffonne, alors sortez vos scalpels, on va disséquer ça.
[L]’histoire est l’objet d’immenses manipulations idéologiques. L’une d’entre elles cherche à nous faire croire que nous serions tous des immigrants, mis à part les Amérindiens, seuls vrais fondateurs de la ville et du pays.
J'aimerais rappeler à M. Bock-Côté que l'humanité est une espèce invasive qui a su s'imposer sur tous les continents et que dès qu'on met les pieds hors de l'Afrique, nous sommes assurément tous des immigrants. En ce qui concerne les Premières nations, je doute qu'elles revendiquent le Canada comme étant leur pays. Leurs démarches de compensation témoignent que leur identité est ailleurs. Qui tente de les maquiller dans un rôle de fondateurs, exactement?
On déclasse symboliquement la Nouvelle-France d’un trait de plume. [...] On réécrit l’histoire. On en invente une nouvelle, mensongère, mais conforme aux canons de la rectitude politique. C’est une histoire multiculturaliste.
Il faut faire la part des choses, nous ne considérons pas Français; comme pour la Louisiane et pour Haïti (d'autres dépendances françaises), nous nous sommes redéfinis plusieurs fois depuis la mère patrie. Cette Nouvelle-France comme mythe fondateur déclasse symboliquement l'histoire de la survie des francophones et de la préservation par nos ancêtres d'une identité distincte. (J'aimerais aussi prendre un instant pour lever mon chapeau à un autre quotidien, qui sait que la notion de multiculturalisme est multiple, et que cette simplification grossière n'aide en rien un argument déjà fragile).
Il s’agit de nier aujourd’hui que la majorité historique francophone soit le cœur de la nation. On veut en faire une communauté parmi d’autres, ayant le même statut que n’importe quelle communauté immigrée­­.
Les Canadiens dont le français et la langue maternelle représentent 22% de la population et pourtant, elle est une des deux langues officielles du pays. Nous ne sommes pas le nombril du monde, et je ne vois pas pourquoi l'admettre nous causerait autant de complexes. D'autant plus que d'admettre la présence précédente de Premières nations est un fait historique impossible à nier.
On justifie historiquement un nouveau droit fondamental, celui de ne pas s’intégrer à la nation d’accueil. On veut transformer les Québécois­­ francophones en étrangers­­ chez eux.
Si on en croit cette théorie, le Canada anglais va devoir faire attention à lui, les Amérindiens veulent les assimiler. Plus sérieusement, nous ne sommes pas notre terre, nos pierres et nos arbres. Personne n'est revenu mort de l'amputation du Labrador et personne pense que nos institutions existent seulement à cause du droit divin des Québécois d'habiter sur le territoire.
Prétendre que nous sommes tous des immigrants, c’est insulter l’histoire de ceux qui ont fondé, défriché et inventé ce pays.
Admettons que je dynamite le rocher Percé, est-ce que j'ai affaibli l'identité québécoise? (Si oui, j'aimerais qu'on m'explique comment.) La révolution tranquille a été faite par notre effort collectif de se moderniser et de remettre en question nos traditions. Lesage a-t-il insulté nos ancêtres en changeant le Québec?
C’est humilier la mémoire de la Nouvelle-France. C’est mépriser sa grandeur mystique et conquérante. C’est nier nos racines françaises. C’est nier notre identité et ridicu­liser nos combats pour la préserver.
J'ai le sentiment que le Québécois moyen (moi inclus) peut nommer plus de chansons d'Elvis Presley que de Félix Leclerc. Avant de parler de notre «grandeur mystique et conquérante» (ça veut dire quoi ça, sérieux? La Nouvelle-France n'est pas disparue justement parce qu'elle n'a point conquis?), on doit prendre quelques minutes pour se demander si le Québec moderne est vraiment basé sur le «Je me souviens» ou si, justement, notre identité ne serait pas plutôt dans le ici et le maintenant.
Nous voulons bien accueillir dans des proportions raisonnables ceux qui veulent s’ajouter à nous pour peu qu’ils s’intègrent. Nous ne voulons­­ pas pour autant nous effacer­­ et disparaître.
Une lecture rapide d'un texte comme celui-là peut sembler vraisemblant (qui a l'apparence d'être vrai sans un examen plus attentif), mais je ne vois pas en quoi une identité québécoise est d'abord et avant tout un produit historique datant de la Nouvelle-France. Il est plutôt un produit de notre histoire contemporaine, de notre langue et de notre culture. Nous ne sommes pas la défaite infligée par Wolfe, nous sommes les conséquences d'être restés malgré tout. Nous sommes un autre chose qui est appelé à devenir encore plus... dès que nous aurons décidé qui nous voulons devenir.

dimanche 5 juin 2016

Le paradoxe des stéréotypes

Je suis végétarien et dès que je le mentionne, j'ajoute souvent «option sans jugement». Le besoin que je ressens de le rajouter me rend de plus en plus mal à l'aise, entre autres parce que le régime alimentaire des gens les regardent, mais aussi parce que mon opinion est très différente du stéréotype. (Par exemple, j'ai un problème de conscience sérieux avec le bio.)

Mon malaise a atteint le point où j'aimerais me distancer de ce mot. Pourtant, je n'ai jamais eu l'intention de me trouver une autre belle petite étiquette. J'ai ni l'envie ni le besoin de sauter d'un stéréotype valise à un autre plus restrictif encore. C'est pas un peu paradoxal de régler le problème en s'installant dans une encore plus petite poupée russe?

Pour moi, la catégorie la plus souhaitable, c'est «autre». Si tu veux en savoir plus, tu demandes. Sinon, tu peux passer à autre chose; je ne réclame rien de particulier à part mon droit à l'indépendance. Je suis en quelque part dans la palette de couleurs de l'humanité et ma différence existe au travers des autres membres de la famille humaine. Il me semble que c'est la seule attitude à avoir si on veut vraiment un jour mettre fin à la discrimination.

Parce que dans le fond, la seule étiquette que je désire vraiment, je l'ai déjà, et c'est mon identité.

dimanche 8 avril 2012

Juste une occasion pour célébrer?

Certains décrient la disparition de la présence culturelle de Pâques. Comme je suis athée, vous pourriez croire que je n'en ai rien à battre. Mais au contraire, l'interprétation faite par la religion me mystifie. Si je comprends bien, Jésus est mort pour expier les péchés humains. Mais si c'est son père qui fait les règles qui ont mené à cette souffrance, ça ressemble plus à un cas de DPJ qu'à un sacrifice noble. Si le paternel ne pardonnait pas aux humains avant qu'ils tuent son fils, c'est encore un barbare sanguinaire.

La lecture que je fais de cette histoire est d'un autre ordre. Jésus voulait faire une société plus juste et ça n'a pas plu à l'ordre établi. Il est mort et ses disciples ont décidé de pas laisser mourir l'idée d'une société meilleure. C'est une histoire intemporelle, dont le printemps arabe est la dernière mouture.

mercredi 24 août 2011

Pourquoi pas faire des tests de dépistage sur le BS?

Je lisais sur Facebook aujourd'hui quelqu'un qui avait copié un statut qui suggérait faire du dépistage de drogue avant de donner des chèques de bien-être social. Je dois admettre que même si je n'ai pas trouvée l'idée séduisante, elle peut sembler bonne à première vue. J'aurais pu simplement aller écrire une rebutade, mais j'ai décidé d'exposer mon opinion en détail, dans le but de vous convaincre.

La première chose qui me chatouille, c'est que même un accusé dans notre système pénal a la présomption d'innocence, c'est-à-dire qu'à moins de faire pas la preuve de sa culpabilité, il est libre. Ce qui voudrait dire qu'on traiterait mieux nos prisonniers qu'une classe sociale parmi laquelle il y a des nécessiteux et des aînés qui n'ont pas pu mettre de côté de leur vivant. Nos cours pénales ne sont pas parfaites, et il y a quand même des gens accusés à tort. Vous voulez avoir l'air d'avoir pris des drogues sans en avoir l'air? Rien de plus simple, il ne faut que manger des grains de pavot! Alors il faudra avertir les gens de ne pas manger de pavot avant de passer le test pour avoir un résultat fiable; et prévenir quelqu'un d'un test à venir est la pire manière de parvenir à des résultats concluants. Il serait donc impossible de surprendre les gens à moins de leur interdire de manger certains aliments et de leur donner des contraintes de ce genre qui, encore une fois, sont pires que celles d'un prisonnier.

En plus, qui paierait pour ces tests et toute la main d'oeuvre nécessaire pour les administrer? Les citoyens. Même si on le fait seulement dans X% des cas, il faut en plus une infrastructure pour faire des tests à l'aveuglette qui vont finir pas couvrir tout un chacun. Pragmatiquement parlant, il serait beaucoup plus pertinent de mettre de l'argent dans la prévention qu'un programme répressif dont les résultats seraient toujours mis en doute. En plus, ça rendrait légitime cette pratique pour avoir un permis de conduire/conserver un emploi/etc.

Mais imaginons un instant un monde dans lequel on aurait une solution peu coûteuse qui fonctionnerait à tout coup et que les libertés civiles ne nous intéressent pas. Si vous attrapez un drogué, vous en faites quoi? Si vous le mettez en prison, vous le logerez encore aux frais de l'État et vous ne dépensez pas moins d'argent. En fait, c'est pire encore parce que vous les amenez à l'université du crime, et certains de vos prisonniers passeront à des délits plus sérieux. Si vous ne faites que leur couper les vivre, vous relâchez dans la nature des gens désespérés qui commettront très probablement des actes qui les ramèneront tout droit en prison, ou qui mettent en danger d'autres personnes. Si on doit appeler ça acheter la paix sociale, est-ce que ça n'en vaudrait pas le coût?

Penser qu'on peut simplement forcer les gens à cesser d'être toxicomane est malheureusement une chimère. Forcer des gens qui souffrent de la dépendance à s'en sortir, les résultats qu'on obtiendrait à les forcer dans des programmes sera probablement aussi inefficace sur le long terme qu'un «boot camp». La beauté de lieux comme des piqueries supervisées, c'est la manière dont cela empêche les overdoses et la transmission de maladies comme le sida. Comme nous avons un système de santé universel, il est très clair que la prévention évite d'avoir à payer pour tenter de guérir ces citoyens, qu'ils aient un abri ou pas.

Si aucun de mes arguments vous convainc encore, j'aimerais prendre un instant pour vous demander pourquoi on interdit les drogues au lieu de les taxer. C'est la seule manière de faire en sorte que les consommateurs paient eux-mêmes pour la prévention, dans tous les autres cas, c'est le citoyen ordinaire qui finance la prévention et la police. On pourrait aussi en réduire l'impact du crime organisé qui profite de cet argent pour commettre d'autres délits plus graves. Je ne suis pas à dire que ce serait tout rose, mais il faut penser que si c'est l'argument financier qui nous motive, il y a beaucoup mieux à faire que de dépenser pour se faire la police des meurs. Je ne pense pas qu'on doit et qu'on peut vraiment contrôler ce que font les gens si cela ne nuit pas à la bonne marche de la société en général, et cette idée me semble avoir des bases beaucoup trop faibles pour résister à toute analyse sérieuse.